
Lors de mon passage sur l’île Rodrigues en 2010, nous avons essayé de visiter tout ce que nous pouvions pendant cette semaine trop courte. Oui, c’est toujours trop court les semaines quand on est sur une île tropicale… Réserve des tortues géantes et ses grottes, Port-Mathurin et son marché du samedi matin, St-François, Trou d’argent… à pied ou en scooter, nous avons fait le tour de l’île. Avec nos plongées le matin, les journées furent bien remplies. Entre temps, la météo a fait des siennes.
Mais voilà : au pied de notre plage… un lagon ! Impossible de ne pas aller explorer ce bassin naturellement protégé par la barrière corallienne, très peu profond. Ici, sur la baie de Coton, c’est l’endroit où le lagon est le plus étroit. Les vagues puissantes se brisent à environ 200m de la plage, alors qu’à l’ouest le lagon fait plus de 12km de long !
C’est en snorkeling, de l’eau jusqu’à la taille la plupart du temps, à marée basse (montante de préférence, vous ne risquerez pas de vous faire emporter par le courant, là au pire vous vous échouerez sur la plage !), que j’ai parcouru une bonne partie de la baie de Coton. J’ai d’ailleurs commencé à pied, en inspectant les quelques rochers volcaniques qui barrent la plage en son milieu… juste par curiosité. J’ai eu la surprise d’y découvrir au-dessus de la surface, quelques petits poissons se tortillant sur le basalte mouillé dès mon approche. Des blennies intertidales, qui ont la particularité de pouvoir rester un moment hors de l’eau, se font dorer sous le soleil du matin.
Côté droit de la baie. C’est ici que je commencerais. Je suis d’abord étonné de trouvé un fond parsemé de Caulerpa taxifolia, l’algue qui fait tant de ravage en Méditerranée après y avoir été introduite accidentellement. Ici, elle est dans son milieu naturel, il n’y a donc aucun problème. A première vue, pas grand chose à se mettre sous le masque. Peu de poisson. Puis apparait un petit baliste Picasso ! Puis deux, trois, quatre… A la vue du baliste, je ne peux m’empêcher de penser au fameux Titan que j’ai eu la chance de côtoyer l’année dernière en Malaisie. En période de nidification, ils sont extrêmement agressif et potentiellement dangereux, car armés d’une puissante dentition proéminente. Mais là, les petits balistes Picasso, vraisemblablement des juvéniles, foncent dans un trou dès lors qu’il sont dérangés… Oufff ! Et puis je m’aperçois vite qu’à cet endroit, la faune en pleine eau est plutôt rare, mais que dans chaque trou, on trouve quelque chose. Et notamment des murènes. Deux espèces principalement, la murène tatouée et la murène étoilée. Au milieu des caulerpes, si vous ouvrez l’oeil, vous trouverez tout une multitude de petites porcelaines « anneaux d’or », dont la coquille blanche-grisâtre est tantôt à nue, tantôt recouverte du manteau de l’animal.
Quelle surprise lorsqu’au milieu du lagon, je trouvais les restes de ce qui ressemblait à un vieux moteur (???) tout concrétionné. C’est d’abord un banc de poissons chat juvéniles qui a attiré mon attention. Ces poissons très venimeux une fois adulte, ont l’habitude de se déplacer en groupe de plusieurs dizaines, voire centaines d’individus, en formant une boule très compacte, s’étirant dans tous les sens… Mais je restais les yeux écarquillés lorsque je vis à quel point ce petit récif artificiel était colonisé: à côté des poissons chat, 2 petits mérous, 3 murènes tatouées, 1 murène étoilée, quelques oursins, de nombreuses porcelaines !
Bien sûr, il fallait que j’aille explorer le site de nuit. C’était l’occasion d’aller à l’eau avec Philippe et Marine, nos nouveaux amis réunionnais, passionné des fonds marins. Je m’apercevais bien vite, que le lagon est bien plus riche à la nuit tombée. Peut-être que bon nombre d’animaux rentrent dans le lagon pour passer la nuit en sécurité… Ceux qui me connaissent savent qu’il met impossible d’aller à l’eau sans au minimum un masque et un tuba… et particulièrement insupportable de le faire sans mon matériel photo. Pourquoi ne pas l’avoir pris ce soir là ??? L’idée saugrenue que je ne verrai rien de bien différent… Heureusement qu’il nous restait une soirée de plus à passer sur Rodrigues ! Rebelote ! Mais cette fois-ci je suis équipé ! Nous découvrons alors de nombreux lièvres de mer velus en cours de reproduction. On arrive à peine à les discerner sur le fond, malgré leur bonne taille, grâce à un camouflage sans faille. Les murènes sont sorties se nourrir, il n’est pas rare d’en croiser en pleine eau, mais également de tout petits congres. Les impressionnants poissons flà»tes dorment en groupe, et lorsque je les approchent de trop près, ils me laissent entendre leur bruit de trompette… La nuit est aussi le moment où l’on peut trouver les fameux ourites : ces petits poulpes de récifs qui sont malheureusement beaucoup pêchés, car ils sont la spécialité locales la plus connue.
Chaque patate de corail est un véritable dortoir, où les poissons se protègent au plus profond des anfractuosités : poissons perroquets, mérous, murènes, écureuils, labres, diodons et autres poissons boites ! Ils n’hésitent pas à s’entasser les uns sur les autres pour la nuit!
Il est évident en voyant la quantité de juvéniles que le lagon est une véritable nurserie. Il est important de le protéger, chose à laquelle s’emploie le gouvernement rodriguais depuis peu… une grande réserve marine vient d’être créée !
Beaucoup d’autres endroits sont à explorer autour de l’île en apnée. Le site de l’Aquarium est aussi accessible, mais par météo calme. Tout comme à St-François, Trou d’argent… Au sud-est, le site de Couzoupa, très beau site de plongée, l’est également pour le snorkeling. Décidement, cette île est un paradis pour la balade, quelque soit le côté de la surface dans lequel on se trouve …